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Interactions ions - plasma

Le dossier " interactions ions-plasma " se fixe pour objectif l'étude du ralentissement et des échanges de charge entre un ion lourd et un gaz d'électrons libres. Ce dossier vous propose une présentation détaillée de celui-ci. C'est parti !

 

1. Introduction générale

Le plasma est un état dilué de la matière analogue à un gaz, mais constitué d'un bain de particules chargées, électrons et ions positifs, en proportions égales et donc globalement neutre.

Le plus simple des plasmas est celui d'hydrogène, formé d'électrons et de protons libres en concentration égale. Pour observer cet état particulier de la matière ou les électrons ne sont plus liés à un atome, il faut maintenir une température élevée dans le milieu. Pour avoir un plasma d'hydrogène complètement ionisé il faut par exemple chauffer le gaz hydrogène au delà de 20 000 °K (~ 2 eV). Le plasma est un état de la matière extrêmement répandu dans l'univers. 99% de la matière de l'univers est sous forme de plasma plus ou moins dense.

Le champ d'étude de la physique des plasmas est donc vaste et interdisciplinaire : astrophysique, physique atomique, physique nucléaire, météorologie...

Depuis 1955, de vastes programmes de recherche se sont donnés pour objectif, la production d'énergie par fusion thermonucléaire contrôlée. Là encore, le plasma est omniprésent et la motivation initiale du programme " interactions ions-plasma " était liée à l'étude du dépôt d'énergie sur les cibles destinées au confinement inertiel par ions lourds et plus particulièrement au ralentissement d'ions lourds dans le plasma dense et chaud qui entoure la cible de fusion.

 

Principe des expériences
La cible de plasma est obtenue par décharge électrique linéaire dans un gaz d'hydrogène ou de deutérium. Elle se caractérise à partir de l'évolution de sa densité linéaire en fonction du temps: n.l = f(t); ou n est la densité du plasma par cm3 et l sa longueur en cm. Les autres paramètres importants pour définir la cible de plasma sont le degré d'ionisation et le taux d'impuretés présentes dans le gaz au cours de la décharge (dégazage ou désorption de parois).


Interactions ions-plasmaUne détermination précise de la densité et de la température du plasma (ou de son degré d'ionisation) s'effectue soit à partir de méthodes de spectroscopie optique (Absorption laser à deux longueurs d'onde, interférométrie laser ou élargissement Stark de raies d'émission de l'hydrogène), soit en utilisant le faisceau d'ions comme sonde. Le principe est basé sur une mesure directe d'échange de charge sur un ion en condition de collision unique.

Notre choix s'est porté sur un ion chlore 16+ à 4,3 MeV/A. Pour ces conditions de vitesse de l'ion incident, la mesure du taux d'ionisation (Cl17+) et du taux de capture (Cl15+) à l'issue de la traversée de la cible de plasma nous donne directement accès à la densité de protons (ionisation) et au taux d'impuretés (capture). La sensibilité de la détermination du taux d'impuretés en éléments lourds est meilleure que 10-4. La décharge est isolée de vide de l'accélérateur au moyen de deux vannes rapides qui ne sont activées qu'à l'instant précis de passage du faisceau.

La physique du dépôt d'énergie concerne les processus fondamentaux mis en jeu dans ces interactions entre les ions projectiles et les électrons libres du plasma. La prévision puis l'observation expérimentale d'un pouvoir d'arrêt accru dans un plasma, comparativement à une même densité de gaz froid ont fait l'objet de la première partie de ce programme.

Cet accroissement du ralentissement résulte d'une part de l'excitation des modes d'oscillation des électrons libres du plasma pour lesquels le transfert d'énergie est plus efficace que pour des électrons liés, et d'autre part de l'état de charge du projectile qui atteint des valeurs plus élevées dans un plasma que dans un gaz froid de même densité. L'importance relative de ces deux contributions dépend de la charge des ions incidents, de leur vitesse, et à un degré moindre de la température et de la densité du plasma.

Les résultats marquants de ces dernières années
La mise en évidence expérimentale du pouvoir d'arrêt renforcé du plasma comparativement à la même densité de gaz froid (un facteur 2 dans le cas des ions du Tandem). Ces expériences ont conforté la validité du modèle standard du pouvoir d'arrêt développé par les théoriciens du laboratoire de physique des gaz et des plasma d'Orsay.

Un programme spécifique d'étude de la dynamique des échanges de charge dans un plasma et sa corrélation avec les pouvoirs d'arrêt, est en cours. La confirmation de la suppression des captures électroniques dans un plasma a été réalisée par le biais d'expérience telle que celles liées à l'épluchage d'ion chlore ou encore la mise en évidence de charge gelée pour des ions épluchés pénétrant dans un plasma.

L'expérience consistait à étudier l'état de charge d'un ion chlore traversant des densités variables d'hydrogène ou de deutérium gazeux froid ou sous forme de plasma. La mesure des distributions de charge en sortie du tube contenant le plasma était réalisée par analyse magnétique et détection sur un scintillant couplé à une caméra CCD.

Les résultats obtenus avec des ions chlore à 1.5 MeV/A ont permis de mettre en évidence deux effets remarquables:
Une distribution de charge après traversée du plasma qui est déplacée vers les états de charge plus élevés. Une modélisation des distributions de charge mesurées en gaz froid puis appliquée au plasma, a permis d'attribuer cet effet à la disparition des captures d'électrons libres. L'effet plasma attendu a donc été observé.

Une mesure de perte d'énergie de ces mêmes ions dans le plasma a d'une part, confirmé le pouvoir d'arrêt renforcé du plasma, mais également permis de définir la contribution relative des deux effets mentionnés précédemment (Charge projectile et électrons libres).

Ce programme se poursuit avec des objectifs expérimentaux nécessitant des sensibilités de détection très fines, ce qui implique une maîtrise parfaite des paramètres du plasma et des effet parasites générés par la décharge tels que l'effet lentille à plasma . Un aimant performant (Split-Pole) couplé à la décharge sera prochainement à même de mettre en évidence une corrélation entre un état de charge d'un ion en sortie de plasma avec une perte d'énergie mesurée et de remonter ainsi à l'historique de l'échange de charge durant la traversée du plasma.

 

2. Fusion par Confinement Inertiel

La Fusion par Confinement Inertiel (ICF) semble actuellement la voie le plus prometteuse pour aboutir à un réacteur civil... à l'horizon 2050!

Le cahier des charges pour l'obtention d'un gain élevé est maintenant bien maîtrisé. Le critère d'homogénéité du dépôt (uniformité du dépôt d'énergie de l'ordre du pour-cent) impose une approche indirecte. Dans cette approche, le dépôt primaire d'énergie est converti en un rayonnement X qui va être le vecteur de la compression.

Les lasers
Ce sont les lasers de puissance qui s'approchent le plus des conditions finales nécessaires à l'allumage des réactions de fusion. Les prochaines années verront la confirmation de ce concept avec l'arrivée d'une version améliorée du laser NOVA , le National Ignition Facility (NIF) qui avec ses 192 lasers de puissance (au lieu des 10 actuels), va produire 40 fois plus d'énergie que NOVA et 10 fois plus de puisssance déposée sur la cible.

La faisabilité de cette approche indirecte a par ailleurs été démontrée par des expériences en grandeur réelle utilisant le flux de rayonnement émis lors d'une explosion atomique souterraine (Centurion Hylite 1988).

Les faisceaux d'ions
Malgré cette avance technologique des lasers, la voie ions-lourds fait l'objet de l'attention soutenue de la communauté internationale ICF en raison des atouts importants de ce type de driver, à savoir :

  1. Rendement énergétique élevé.
  2. Taux de répétition élevé.
  3. Technologie bien maîtrisée et fiable

De plus les faisceaux lourds se prêtent bien à la phase de transport balistique qui intervient à l'intérieur de l'enceinte du réacteur lorsque le faisceau parcours les derniers mètres jusqu'à la cible.

Les problèmes à résoudre
La réalisation d'un réacteur à fusion passe par notre capacité à déposer environ 2 MJ sur une cible de quelques mm de diamètre en moins de 10 ns. Ceci implique la production, le transport et le focalisation de faisceaux pulsés intenses. Pour donner un ordre de grandeur, le projet Européen HIDIF considère la convergence de 48 faisceaux de 10 kA de Bi+ à 10 GeV.

Il ne semble pas y avoir d'obstacle majeur à la compréhension et à la maîtrise du dépôt d'énergie sur la cible de fusion (via un convertisseur dans le cas du processus indirect). Les problèmes technologiques sont liés à l'obtention et à la conduite jusqu'au point cible de faisceaux intenses et à la réalisation de cibles donnant des rendements élevés. 

 

3. Lentille à plasma

L'effet lentille à plasma traduit un phénomène de focalisation-défocalisation d'un faisceau de particules chargées lors de son parcours dans une cible de plasma. Exploité depuis les années 50 sur des faisceaux de particules, cet effet a été observé pour la première fois à Orsay en 1988 sur des ions de carbone traversant une colonne de plasma d'hydrogène.
La colonne de plasma est créée par le passage d'un courant électrique intense dans un gaz servant de support. Après quelques µs, le gaz est ionisé et le plasma est thermalisé. Dès cet instant un courant de 2 à 5 KA, colinéaire à l'axe du tube, parcours un milieu conducteur (la résistance du plasma n'est plus que de quelques ohms). Ce courant est sinusoïdal amorti, sa période est d'environ 20 µs. Il génère un champ magnétique azimutal intense. Ce champ, qui est fonction de la distance à l'axe du plasma, agit sur les ions du faisceau par le biais de la force de Lorentz radiale qui fait dévier les ions de leurs trajectoires. La valeur de l'angle de déviation dépend de la charge et de la vitesse de l'ion et aussi bien entendu, de l'intensité du champ magnétique. Son sens dépend seulement de la direction relative du courant plasma par rapport à celle du faisceau incident.

Interactions ions-plasma

Ce phénomène d'effet lentille peut être exploité pour le transport et la focalisation des faisceaux d'ions lourds , intenses et énergétiques. En effet la particularité de ce mode de focalisation par rapport aux lentilles magnétiques conventionnelles est :

  1. Focalisation simultanée, et homogène sur l'ensemble du cylindre.
  2. Obtention des gradients intenses de champs magnétique (plusieurs Tesla mètre).
  3. Compensation de l'effet de charge d'espace due au bain d'électrons que constitue le plasma.

Interactions ions-plasma

Une modélisation complète de la traversée d'un faisceau d'ion dans un plasma créé par décharge linéaire incluant les échanges de charge, les pertes d'énergie et les effets lentille est disponible sous forme d'un programme FORTRAN. Ce programme construit les figures d'émittance après l'interaction avec le plasma. Il est disponible sur PC.

Dès 1950, un faisceau de protons, de 350 MeV d'énergie, délivré par l'accélérateur cyclotron de Berkeley, a été focalisé pour la première fois par une lentille à plasma . Depuis 1983, d'importants travaux pour la maîtrise et l'exploitation de cet effet, ont été entrepris par le CERN avec le projet ACOL de focalisation de faisceaux secondaires d'antiprotons et pour le futur, ces lentilles sont envisagées dans le cadre de projet de fusion par confinement inertiel par faisceaux d'ions lourds. On peut citer comme exemple de performance, la focalisation d'un faisceau d'ions Au de 2.2 GeV (issu de l'accélérateur UNILAC de GSI Darmstadt) qui a été réduit d'un facteur 40 par traversée d'une colonne de plasma de 10 cm de longueur; il est passé de 10 à 0.25 mm de diamètre.

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